5 idées reçues sur la stratégie d’entreprise

Stratégie d'entreprise: mythes et réalités

Voilà plus de 18 ans maintenant que je rencontre des entreprises chaque semaine pour parler de leur stratégie. Et peut-être autant d’années que les dirigeants partagent avec moi quelques idées reçues, issues le plus souvent de leurs croyances, et qu’il me faut même parfois combattre. Je vous propose ici de parcourir 5 idées reçues sur la stratégie d’entreprise issues du recueil de nombreux échanges avec mes clients.

La 1ére question qu’il faudrait peut être se poser serait : pourquoi faut-il combattre les idées reçues sur la stratégie d’entreprises ?

Tout simplement car elles sont le plus souvent bloquantes. Par l’inquiétude assez naturelle de devoir changer et donc aller à l’encontre de ce que l’on connait déjà et qui est donc sécurisant. Soit par peur de l’échec. Et si cela ne marchait pas ?

Changer peut-être vécu par certains chefs d’entreprise comme une perte de contrôle et même parfois de ne plus se sentir le capitaine de son propre navire. Mais nous allons voir cela au travers de 5 principales idées reçues sur la stratégie d’entreprise auxquelles je me propose de répondre.

Tous les domaines d’activité où l’humain est présent ont leurs mythes. La stratégie d’entreprise ne fait pas exception. Voici 5 idées reçues sur la stratégie d’entreprise que je me propose de défendre.

Idée reçue n°1 : la stratégie d’entreprise s’établit à long terme

Parmi les 5 idées reçues sur la stratégie d’entreprise la première qui me vienne en tête est la notion de durée de la stratégie.

Certains métiers, où les process et les engagements sont longs comme l’aéronautique par exemple, ont besoin d’une planification longue. Certains ont des cycles économiques très long (ex. le nucléaire). La stratégie s’inscrit donc plus dans une vision et une projection que dans des manœuvres opérationnelles à court terme. Mais pour la majorité des activités les cycles sont bien plus cours et les aléas de marché (ex. mouvements boursiers), causés par la réglementation (Ex. sur l’habitat et la rénovation énergétique des bâtiments), les décisions politiques (Ex. retraite à 64 ans) ou l’arrivée de nouveaux acteurs (Ex. voitures électriques Chinoises) et bien d’autres encore obligent l’entreprise à s’adapter régulièrement. Ce qui était vrai deux ans auparavant n’est plus opérant voir adapté.

Pourquoi ce n’est pas juste

C’est précisément lorsque des idées reçues sont confrontées à une réalité changeante que les idées reçues sont remises en cause que les changements stratégiques doivent avoir lieu. Et ces changements devront être mis en place très rapidement. Considérer la stratégie comme une chemin à parcourir sur le long terme a de forts risques de conduire à ignorer certaines adaptations devenues obligatoires.

La stratégie a trait aux fondamentaux du fonctionnement de votre entreprise : les sources de création de valeur, les vecteurs des coûts pour délivrer cette valeur, les attentes du marché…

Pour bien appréhender votre stratégie, il n’est pas nécessaire d’élargir l’horizon temporel de notre réflexion mais de la revoir dans sa profondeur. Il ne s’agit pas de définir ce que sera notre futur car cela serait nécessairement trop incertains. La stratégie concerne ce que nous allons faire dès maintenant en fonction de l’analyse que nous faisons des éléments macro et micro de notre marché afin de façonner notre modèle d’avenir à notre avantage.

Ainsi, réadapter votre stratégie, vérifier que vous êtes aligné avec vos valeurs et comment produire davantage de valeur ajoutée auprès de vos équipes (ex. développement de la RSE) et auprès de vos clients est un exercice qu’il faut mener en moyenne tous les 2 ans. C’est ma conviction.

Idée reçue n°2 : De nombreux événements modifient régulièrement la stratégie

A en voir le développement de nombreuses start-ups on pourrait imaginer que la valeur ajoutée vient uniquement de l’innovation, de modèles opportunistes (réponse à un besoin non encore assouvis) ou diruptifs (visant à casser codes et habitudes).

Ainsi, quand on pense innovation on y associe assez souvent un changement de direction stratégique.

Pourquoi ce n’est pas juste

Cela voudrait dire que pour garder le cap je devrais jouer de mon safran à chaque vague. Au-delà du fait que je perdrais du temps et de l’énergie sur mes objectifs finaux, ma vision en serait altérée pour devenir trouble puis faire jaillir des doutes. Les aléas et les adaptations, à la marge ou plus profondes, font partie intégrante de la stratégie et se doivent d’être le plus possible anticipé pour ne pas se retrouver dans une impasse. Ainsi la diversification produits/services, l’anticipation d’une nouvelle contrainte réglementaire ou l’arrivée d’un nouveau concurrent doit être déjà incluse dans la stratégie.

Lors de mes échanges avec certains gérants d’entreprise je les vois parfois impressionnés par certaines stratégies qu’ils trouvent innovantes et efficientes. Le dernier livre d’Elon Musk sur leur étagère (Elon Musk : l’entrepreneur qui va changer le monde)… Ainsi, la stratégie qui consiste par exemple à proposer un produit/service gratuit afin de faire découvrir et tester ce produit/service à un très grand nombre d’utilisateurs pour en capter les données (en vue d’une opération de mass marketing) permet de gagner des clients rapidement et des parts de marché sur ses concurrents. Nous pensons entre-autre à Free et à Amazon Prime mais ce concept est vieux d’un demi-siècle (…) et comme le tunnel de vente la version visible d’une stratégie bien plus ancrée et le plus souvent multimodale.

De façon plus modeste, quand le stand fromages votre supermarché Leclerc vous fait déguster un munster en promotion à 10h du matin il utilise une stratégie de test produit vielle comme le monde… et génère en moyenne plus de 30% d’augmentation des ventes sur ce produit (…)

Idée reçue n°3 : il n’y a forcément d’avantage compétitif dans l’établissement d’une stratégie

Pourquoi ce n’est pas juste

Bénéficier d’un avantage compétitif est essentiel pour toute entreprise qui souhaite se démarquer de ses concurrents et faire la différence sur son marché. Les cycles économiques étant de plus en plus court l’avantage compétitif d’hier ne sera que rarement celui de demain. La nécessité d’adaptation -et donc de mise à jour de sa stratégie- est donc indispensable.

Par ailleurs, ces avantages compétitifs ne sont pas réservés aux plus grandes marques qui ont su les construire avec l’aide de consultants et de gros moyens en terme d’innovation. Ainsi Apple ou Microsoft font force de multiples avantages compétitifs (ex. l’écosystème qui enferme le client Apple pour l’obliger à utiliser les services de la marque à la pomme) en développant des stratégies connexes afin de bloquer l’arrivée de nouveaux concurrents. Plutôt que ne miser sur un seul avantage (ex. Prime pour Amazon ou ICloud pour Apple) ces géants créent de multiples barrières qui contraignent leur concurrent à rester des suiveurs. Voir des « ringards » si j’osais (…)

La force d’une stratégie d’entreprise sera donc de donner un guide, de s’adapter au marché et de sécuriser les savoir-faire maison accumulés parfois depuis des années. Je travaille actuellement pour un hôtel restaurant de luxe situé en plus cœur du Pays Basque intérieur et la stratégie de conquête d’une nouvelle clientèle (plus aisée) passe par la création aussi de ses barrières afin de gagner en compétitivité vis-à-vis de ses concurrents voire de ne jamais leur permettre de rivaliser…

Idée reçue n°4 : on peut très bien se passer de stratégie si l’entreprise a développé un process agile

Les entreprises agiles -comme par nature les start-ups- s’adaptent constamment et semblent ne suivre aucun plan précis. L’innovation ou du moins la R&D étant leur principal moteur. Aussi quand il faut passer en mode commercialisation et se poser des questions essentielles du type « A qui je vends ? », « Sur quels marchés ? », « Que fait la concurrence de mieux/moins bien que moi ? »… il n’y a le plus souvent que des réponses évasives (et parfois pas de réponses du tout).

Pourquoi ce n’est pas juste

L’agilité n’est pas une stratégie mais une façon plus rapide de se mouvoir.

C’est une capacité, extrêmement utile, certes, et dont les bénéfices opérationnels sont souvent immédiats, mais qui ne saurait jouer sur la position concurrentielle d’une entreprise de manière durable sauf si votre consultant bien sur sait l’appliquer à bon escient.

Une stratégie n’est pas un plan, c’est un cadre d’aide à la décision, un ensemble de principes directeurs qui peuvent être mis en œuvre à mesure que la situation évolue. Le déploiement d’actions opérationnelles venants servir la stratégie.

Et si certaines PME échouent, c’est aussi parce qu’être agile (management concentré, petite structure, décisions rapides, délais d’exécution du workflow en ligne…) ne veut pas forcément dire qu’elle est en capacité de prendre la bonne direction.

Les TPE et PME qui fonctionnement bien réfléchissent de fait beaucoup à leurs fondamentaux, en remettant en cause et en testant leurs présupposés de base avec une rigueur dont leurs concurrents seraient bien souvent avisés de s’inspirer. C’est ce que je mets en place actuellement dans un groupement d’agence immobilières sur Biarritz. « Nous voulons challenger nos fondamentaux » me disait son gérant lors de notre première rencontre. Avant de rajouter « Mais en vérifiant si notre stratégie est la bonne. Alors que le marché de la transaction est en chute de 23% chez nous, nous n’en sommes plus très sûr ! ».

Étant donné qu’elles disposent de très peu de ressources, elles n’ont souvent pas vraiment le choix. Sans stratégie cohérente et adaptée à leur structure elles seraient dans l’incapacité d’allouer ces ressources (humaines, financières, structurelles…) de manière optimale. Ce qui, pour une PME et encore plus pour une TPE, ne veut pas dire une simple baisse de CA mais la disparition programmée (…)

Idées reçue n°5 : il est indispensable d’avoir une stratégie numérique

Je sais, je lance un pavé dans la marre du marketing comme d’autres, bien plus talentueux que moi, on sut le faire bien avant.

Le numérique est omniprésent. Depuis notre radio réveil jusqu’à la gestion de données en passant par l’enrichissement des propositions marketing via l’IA. Étant partout dans notre vie, elle doit donc être partout dans l’entreprise alors ! Pas si sûr…

Pourquoi ce n’est pas juste

Une entreprise est un organisme vivant. Je parle souvent aux clients du cabinet (trop souvent peut être) de leur écosystème. Si vous essayez d’optimiser ses composantes séparément, vous vous retrouverez avec un ensemble sous-optimisé et parfois même non opérationnel.

D’expérience, depuis près de 20 ans, on a rarement besoin d’une stratégie numérique, l’informatique, d’une stratégie financière, d’une stratégie des ressources humaines ou que sais-je encore, mais d’une stratégie globale qui servent l’ensemble de l’entreprise.

En conséquence, vouloir développer une stratégie pour la partie purement numérique de votre entreprise sans vous préoccuper du reste est illusoire et contre-productive. Dés même l’élaboration du cahier des charges vous vous confronterez à un mur de questionnements. Sans avoir les réponses en amont point de stratégie numérique mais de la communication descendante sans impact.

En revanche, comme le numérique et les technologies plus pointues nées dans son sillage comme l’intelligence artificielle modifient fondamentalement les sources de création de valeur et ce qu’il en coûte de délivrer cette dernière, pour aborder la question du numérique, vous devrez examiner tous vos fondamentaux. Ceux relatifs au fonctionnement de votre entreprise, les détailler et vous demander s’ils sont encore d’actualité, s’ils répondent au marché et aux souhaits et aspirations de vos clients. Ce en quoi, de fait, la stratégie d’entreprise a toujours consisté. Ainsi quand on évoque les 5 idées reçues sur la stratégie d’entreprise on pourrait multiplier ces idées préconçues par 10, par 100 seulement sur les questions du numérique, du digital, de l’IT et au delà de l’ensemble des technologies appliquées à l’entreprise.

Et donc maintenant ?

Dans notre monde incertain, il nous faut constamment réévaluer la validité de nos fondamentaux, que ce soit pour le court ou le long terme. Surtout quand le long terme d’hier est devenu le moyen terme d’aujourd’hui. Les 5 idées reçues sur la stratégie d’entreprise sont donc bien plus nombreuses.

Mes premiers conseils

Réfléchissez à la manière dont vous pouvez déployer vos capacités actuelles et en développer de nouvelles nécessaires à la défense de votre position et avantages concurrentiels.

Adaptez-les progressivement pour constituer autant de barrières et de freins pour maintenir à distance vos concurrents.

Soyez au clair sur ce qui vous différenciera de façon à pouvoir prendre rapidement des décisions d’allocation de ressources afin de gagner en efficacité et réactivité.

Soyez prêt à réagir à l’émergence d’événements inattendus (ils sont si nombreux actuellement) à vos KPI (Key Performance Indicators) indicateurs d’opportunités délibérément exploitables à chaque point de contact avec les clients.

Cherchez à gagner de petites victoires qui vous permettront de remporter plus tard de grosses batailles. (Je sais cela peut paraitre une phrase toute faite mais je vois trop de PME en Nouvelle Aquitaine et dans d’autres contrées parfois même civilisées 😀  qui n’engagent rien et ne créent ni dynamique ni effets de leviers).

Réfléchissez en profondeur et agissez vite. « Think Global Act Local » me disaient mes professeurs d’université en Angleterre en un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaitre (…)

La stratégie consiste toujours de l’art de prendre du recul sur un fonctionnement, d’analyser, de comparer, d’imaginer et de prendre des décisions sous la pression de conditions parfois (souvent) difficiles.

La stratégie dans son fondement n’a pas changé, c’est le monde qui change.

A lire également sur le thème de la stratégie d’entreprise : FAIRE APPEL À UN CONSULTANT EN STRATEGIE

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