A en lire la presse, spécialisée ou pas, et à en entendre les différents médias le cru 2024 du salon CHOOSE France battrait un nouveau record pour notre économie. Avec plus de 56 projets de lourds investissements la France n’aurait jamais été aussi attractive. Mais ces annonces, qui regroupent des intention et des signatures parfois datant de plusieurs mois ( …) se bousculent avec une autre réalité et celle-ci bien plus opérationnelle : la production industrielle Française baisse et la productivité des emplois dites industriels est en baisse. Alors, CHOOSE France attractivité du territoire: on nous aurait menti ?
Quel contexte international ?
C’est dans un contexte international tendu où les Etats-Unis et la Chine se battent pour assoir leur hégémonie mondiale face à une Europe encore un peu vacillante que s’est tenu le 13 Mai dernier le 7éme somment Choose France. Présidé par Mr le Président Emmanuel Macron, il s’agit reconnaissons-le d’un coup de com’ au travers d’annonces toujours plus grandes : doublement des projets en 2024 versus 2023, 15 Milliards seront investis par de grands groupes internationaux (contre 13 Milliards en 2023) et la génération de plus de 10 000 emplois directs et indirects. Bref, des victoires et un marqueur très positif semble-t-il des choix économiques du gouvernement pour rendre la France encore plus attractive.
Quels sont les projets et les investissements ?
Parmi les nombreux projets nous pouvons constater que ceux-ci sont plutôt fléchés sur la région Grand Est et concernent plus l’agrandissement d’unités de production que la création de nouveaux pôles industriels. On notera également bien sur le renforcement de Microsoft en France en région PACA ou le développement de data centers pour le cabinet d’audit Accenture. Enfin, la région Ile de France et Auvergne-Rhône-Alpes verra Amazon investir dans de nouveaux entrepôts logistiques et un tout nouveau data center où des projets de développement de l’IA seront développés. Bref, presque toutes les régions sont concernées et ces investissements, à l’écoute des annonces relayées par Mr Bruno Le Maire -Ministre de l’économie et des finance- vont irradier une France en plein développement. (Nb. Prés de la moitié des projets concernant des villes de moins de 20 000 habitants. Oui d’accord mais c’est là où il reste du foncier non ?
Une production industrielle qui stagne
Toutefois, dans ce concert d’enthousiasme, le cabinet de conseil Asterès apporte un large bémol à ces déclarations. Le cabinet souligne que chaque année, plusieurs milliards d’euros d’investissements sont annoncés lors du sommet Choose France alors que l’attractivité générale de la France ne s’est pas nécessairement améliorée. (contenu d’une note produite et publiée le 12 mai).
Si les IDE -flux d’investissements directs à l’étranger- entrants et sortants ont beaucoup fluctué pour de multiples causes que nous connaissons toutes et tous (la crise sanitaire, rebond puis baisse significative en 2023, contexte international, choc de simplification qui n’est pas intervenu…), dans l’ensemble, il ne semble pas y avoir eu de hausse régulière de flux d’IDE (Investissements Directs Etrangers) entrants depuis une dizaine d’années. C’est le constat sans appel d’Asterès, qui conclut même à une stagnation de l’attractivité du pays face à nos partenaires et rivaux comme l’Allemagne par exemple.
Les projets d’implantation de sites industriels restent néanmoins un bon indicateur de confiance depuis quelques années. Mais le volume de production industrielle en France est quant à lui globalement atone : en mars 2024 il est même identique à ce qu’il était en janvier 2010 (…)
L’attractivité du pays, qui a été attestée par certains indicateurs comme les décisions d’implantations (voir le baromètre du cabinet EY) n’a pas eu d’effets positifs et remarquables sur la production industrielle. C’est le constat de plusieurs cabinets d’étude et ce que nous pouvons aussi constater en région Nouvelle Aquitaine.
Quid de l’emploi industriel
Concernant l’emploi industriel il est en hausse depuis 2017 avec plus de 100.000 emplois créés en sept ans. Mais face à un volume de production qui stagne et une diminution de la productivité moyenne des emplois industriels en France et en Europe nous pouvons avoir néanmoins quelques inquiétudes. Surtout si ces signaux forts se pérennisent. Alors pour-nous dire que CHOOSE France attractivité du territoire: on nous aurait donc menti ? Du moins nous pouvons dire que le gouvernement a été très optimiste et utilisé la méthode Coué (…)
Les intercommunalités, dont nous pouvons nous poser la question de leur rôle et de leur coût (nb. Sensées au départ regrouper des services et gagner en efficacité alors que nous constatons le contraire…) n’ont de cesse de dire que la réindustrialisation doit partir du terrain. Et sur ce point je suis plutôt d’accord pour certains projets (ex. réindustrialisation du bassin de Lacq via la chimie verte).
L’enjeu de demain sera à mon sens plus vers la généralisation de binômes région + intercommunalités pour développer les Territoires d’industries. Des compétences croisées et une maitrise opérationnelle des besoins, des ressources et des capacités de transformation de leur territoire.
Alors, France Territoire d’industrie ?
CHOOSE France attractivité du territoire: on nous aurait menti ou pas ? Je reconnais être gêné par ces annonces qui semblent tellement prometteuses qu’elles créent le doute et de voir certains cabinets apolitiques les tailler les brèches ne fait que décrédibiliser ses auteurs. Surtout quand on compare ces investissements aux autres réalisés dans l’UE qui sont bien au-delà de la France. A mon sens nous sommes bien trop égocentrés face à des réalités et persistante : nos grèves à répétition, un mauvais climat social, une incapacité à nous remettre en question, des métiers en tension, une insécurité montante… autant d’indicateurs que fragilisent la perception de la France sur l’échiquier international.
Pour aller plus loin et en complément:
- En 2023 a été stoppé le phénomène de rattrapage post-pandémie des investissements directs étrangers (IDE) avec un nombre de projets diminuant de 4 % sur un an
- La France reste le pays européen le plus attractif, malgré un repli de 5 % des projets. Le Royaume-Uni apparaît en deuxième position (+6 %) du classement EY. L’Allemagne arrive en troisième position, marquée par une baisse de 12 % des projets d’investissement.
- Au niveau des villes et malgré le Brexit, es investisseurs considèrent Londres comme la ville la plus attrayante pour les investissements. Paris la talonne de prés.
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